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Publié le 25 Juin 2014

Mon opinel…

S’il est des moments importants dans la vie d’un homme, et à fortiori lorsqu’il est encore enfant, c’est bien celui où son père lui fait cadeau de son premier couteau. En vérité, je ne sais pas si cela se fait toujours. Et pour ma part, je n’ai pas perpétué la tradition qu’au seul profit de mon garçon, mais aussi au bénéfice de mes filles.

C’est souvent l’opinel que l’on offre. Du moins, c’est un opinel que mon père m’a offert et ce sont aussi des opinels que j’ai offerts. L’opinel est un couteau merveilleux, de simplicité et d’efficacité, mais aussi de sécurité avec sa virole qui bloque la lame lorsqu’elle est ouverte et interdit ainsi l’accident classique qui voit le tranchant se refermer sur les phalanges.

Ce manche de bois clair, dont la forme épouse parfaitement la main lorsqu’on l’appréhende, mais aussi et surtout sa lame d’acier robuste, que l’on ne doit surtout pas laver me disait mon père, mais simplement essuyer après usage. Nous la mettions en travers de la paume et constatant qu’elle la dépassait, nous nous faisons l’illusion qu’il était interdit de porter ce couteau sur nous, puisqu’il était une arme redoutable.

Trancher un pain à la croûte craquante et à la mie mousseuse, couper une pomme ferme et juteuse, faisait de moi presque un homme.

Mais l’usage qui me réjouissait le plus était la coupe et le taillage du bois. C’est avec mon couteau que j’ai bâti des moulins à eau. Grâce à mon canif que des bateaux ont vogué sur les ruisseaux. Avec lui, j’ai taillé des lances-pierres, des arcs et des flèches, construit une sarbacane et même fabriqué dans du bois de sureau une flûte dont je tirai des sons fort honorables. 

À chaque mouvement la lame jetait des éclairs sous la lumière tremblante des sous-bois. Les copeaux bruns révélaient la pulpe du bois blanc et tendre. Je grattais le bois vert, développant de fins et longs rubans d’écorce qu’accompagnait une odeur de sève fraîche.

 Si j’ai toujours un couteau, je ne coupe plus les branches des arbustes. Mais il m’arrive encore à mon âge, lors de balades, de ramasser un bout de bois mort et maladroitement d’essayer de  lui redonner une autre vie avec la lame de mon opinel.   

Ciseaux... photos Carole Obadia.

Ciseaux... photos Carole Obadia.

 

Carole OBADIA ébéniste.

 

« Je suis ébéniste, restauratrice de meubles anciens. Il y a dans mon métier, même si c’est à l’origine un métier d’homme, de plus en plus de femmes. Elles ne se mettent pas en avant. Elles sont dans les ateliers et rarement chefs d’entreprise. C’est difficile de faire sa place dans ce métier d’hommes. J’ai vingt ans de métier, mais les premières années ont été difficiles.  Il y a vingt ans, on se faisait raccrocher ou claquer la porte au nez par la clientèle quand elle apprenait que c’était une femme qui allait faire le travail. Les choses ont évolué et maintenant, les clients ont sans doute plus confiance en une femme pour les travaux minutieux. Je travaille avec des rabots, des ciseaux à bois. Ils ressemblent à des burins, mais bien affûtés. C’est pour cela que l’on appelle cet outil un ciseau. Avec lui, on fait pratiquement tout ce que l’on veut ».

« Pour être ébéniste, il faut être amoureux du bois. C’est une passion. Le bois, c’est une odeur, c’est une âme, c’est vivant. Cela se ressent lorsque l’on restaure un meuble ancien. Il arrive dans l’atelier, tout éteint, abîmé et nous lui redonnons son âme. Le bois vivant se ressent plus dans la restauration de mobilier d’art. Les ébénistes restauratrices sont un petit peu les infirmières du meuble. Lorsque l’on travaille le bois, tous les sens sont en éveil. L’odorat, le touché, la vue. Quand on est perfectionniste, il faut avoir le regard affuté. Mais aussi l’ouïe. Lorsque vous vernissez au tampon, vous écoutez son frottement. Lorsque vous rabotez, selon l’épaisseur du copeau, le son sera différent. Le bois éveille tous les sens de celle ou celui qui le travaille ».

« On ne travaille pas les bois de la même façon selon les essences précieuses, le bois de rose, le bois de violette, de l’ébène, du palissandre. Le bois de violette est violet, le bois de rose est rose. L’amarante est un bois violet vif. Le terme ébéniste vient du nom du bois d’ébène, qui est très dur, difficile à travailler et qui « désaffute » les outils. Maintenant on travaille l’ébène, surtout en marqueterie. C’est un bois noir, dur comme de l’acier et qui est très dense, c’est pour cela qu’il ne flotte pas. Chaque essence à sa destination, par exemple, le hêtre qui est un bois dur et travaillant très peu, est utilisé pour fabriquer les chaises, ce qui évite que les pieds se voilent ou que le dossier se gauchisse. Les bois denses sont plus résistants au changement de température et à l’hygrométrie. Pour l’extérieur, nous allons utiliser des bois d’acajou, des bois exotiques, qui résistent beaucoup mieux à l’humidité. Le noyer est un très joli bois sans doute le plus travaillé en France. Les ébénistes travaillent aussi beaucoup les arbres fruitiers, le merisier, le cerisier, le citronnier en marqueterie par exemple. L’olivier se travaille aussi, mais il est tellement noueux que l’on ne peut pas faire de meubles avec. »

« La marqueterie exige une grande minutie, une grande précision, un perfectionnisme. À Marseille, le lycée Poisson Chapuis apprend la marqueterie. En Marqueterie, on travaille toutes les loupes. La loupe d’orme, par exemple. (Le bois d’orme pousse dans les haies et est régulièrement taillé. Il fait des rejets avortés sur tout ou parties de son tronc, ce qui crée des desseins dans le bois). Finement débité, c’est cela qui donne la loupe que l’on utilise en placage et en marqueterie ». 

«  Nous fabriquons les meubles à la demande. Après avoir entendu ce que vous souhaitez, nous vous proposons un dessin, des essences, des essais de couleurs, de vernis. Avant les ébénistes faisaient beaucoup de copies. On nous en demande de moins en moins. Le meuble ancien coûte maintenant moins cher, mais est aussi moins tendance. Nous proposons des créations, nous réalisons pour des designers. Dans l’ancien, il y a des meubles de style et d’influences régionales. Mais dans les meubles modernes, il n’y a pas de style régional ».

« Nous travaillons la même matière et nous utilisons les mêmes outils que les menuisiers, mais notre métier est totalement différent. Même réparateur de meubles est devenu une spécialité différente de l’ébénisterie ».

« En marqueterie, nous travaillons d’autres matières que le bois, comme l’écaille de tortue, l’ivoire, la nacre, le laiton, le galuchat qui est la peau de requin. Des matières nobles et rares. Nous ne pouvons pas utiliser ces matériaux  en création, car ils sont protégés. En revanche, nous avons un agrément qui nous est distillé au compte-gouttes pour utiliser ces matériaux protégés dans le cadre des restaurations ».

« Lorsque l’on fait faire du meuble sur mesures, les prix sont proches de ce que l’on trouve dans le commerce ».

 

Recueilli par Jacques Marie pour La gueule de l'emploi

Eglise Sainte-Enimie sainte Anne la Vierge Marie et l’Enfant Jésus

Eglise Sainte-Enimie sainte Anne la Vierge Marie et l’Enfant Jésus

Sainte patronne des ébénistes

 

Sainte Anne, qui est fêtée le 26 juillet est la mère de Marie et donc la grand-mère de Jésus dans la tradition chrétienne. Aucun texte du Nouveau Testament ne mentionne le nom d'Anne. Seul un évangile apocryphe à la fin du IIe siècle, dit évangile de saint Jacques, parle des parents de la Sainte Vierge. On dit qu’Anne fut longtemps stérile, son mari Joachim était très vieux. La naissance de la Vierge répondant à leur prière est miraculeuse.

En 550, une église est construite en l'honneur de sainte Anne à Constantinople. La fin du Moyen Âge voit l'apogée de son culte avec une multitude des statues montrant Anne, Marie et l'enfant Jésus, appelées « trinités mariales », en parallèle à la Sainte Trinité. Mais l'Église interdit assez vite la représentation des trinités mariales pour éviter la confusion avec la Trinité au sens théologique.

En Bretagne, le culte de saint Anne date du XIIe siècle. Sa popularité chez les Bretons est généralement expliquée par la rémanence des légendes celtes attachées à la déesse Dana. En breton, sainte Anne est surnommée : « Mamm gozh ar Vretoned », c’est-à-dire la grand-mère des Bretons.

Ses reliques sont répandues dans toute la chrétienté, à Apt et en Bretagne, mais aussi à Florence en Italie, à Innsbruck en Autriche, à Mainar en Espagne et même dans la province du Québec.

Sainte Anne assure sa protection de nombreuses et diverses corporations, sans que l’on sache vraiment pourquoi. Ainsi elle est la sainte patronne des tourneurs et sculpteurs sur bois, mais aussi des ébénistes et des fabricants de balais. Les bonnetiers et les gantiers, les dentellières, les brodeuses et les fabricants de bas, les couturières, lavandières et blanchisseurs, ainsi que les cardeurs de laine et les chiffonniers l’honorent comme protectrice. Les navigateurs et mineurs bretons invoquent aussi sa protection.

 

 

Sources : La Fleur des saints – Omer ENGLEBERT – Albain Michel – 1984 / www.saint-dicton.com

Carole Obadia dans son atelier...

Carole Obadia dans son atelier...

MÉTIER ÉBÉNISTE

Missions

L'ébéniste fabrique des meubles de sa création ou des copies de meubles anciens. Il les réalise à l’unité ou en petite série, en bois massif ou plaqué. Il utilise de nombreuses essences de bois. Il définit un modèle et son ornementation. Avec une formation complémentaire, il peut s’orienter vers la restauration et la conservation de meubles anciens.

Moyens

Il scie les pièces de bois et les rabote pour les mettre aux dimensions exactes. Il assemble et colle de fines feuilles de bois, selon l'effet décoratif recherché (motifs droits ou courbes). Il vérifie le parfait ajustement des pièces par un montage « à blanc ». La finition se fait par raclage, ponçage, vernissage ou cirage. Parfois, comme marqueteur, doreur, sculpteur sur bois, il parfait la décoration en travaillant le bois ou en incrustant des motifs en nacre, ivoire, ébène...

Compétences

 

L'ébéniste maîtrise le dessin et la géométrie dans l'espace. Il lit et élaborer les plans. L'ébéniste possède également des notions d'art ou d'histoire de l'art et connaît les techniques d'assemblage et les styles propres aux différentes époques.

L'ébéniste connaît bien les différentes essences de bois et leurs propriétés. Faisant preuve d'un réel talent artistique, il sait jouer avec les matières et les styles de mobilier.

Minutieux et soigneux, il combine habileté manuelle et sens de l'esthétique. Patient, il travaille debout et dans un environnement peu confortable (bruit, poussière, odeurs de bois et de produits...).

Production

L'ébéniste peut également restaurer des meubles anciens appartenant à des collections de musées ou à des particuliers : il participe ainsi à la conservation du patrimoine. Enfin, certains clients font appel à son savoir-faire pour copier des meubles d'époque (buffet Louis XV, commode Louis-Philippe).   

Perspectives d'évolution professionnelle

Avec quelques années d’expérience (cinq ans minimum) et des connaissances en gestion et comptabilité, on peut créer ou reprendre une entreprise.

Restauration... Photo Carole Obadia.

Restauration... Photo Carole Obadia.

LES FORMATIONS ET DIPLÔMES

 

CAP ébéniste :

Première qualification pour exercer le métier d'ébéniste. Le titulaire de ce diplôme fabrique et répare des meubles à l'unité ou en nombre limité, selon un mode artisanal. A partir des plans et des instructions qui lui ont été donnés, il exécute une partie ou un ensemble de mobilier. Il réalise aussi les placages, les frisages, le montage des meubles et les finitions (ponçage, mise en teinte...).

CAP ébéniste

CAP art du bois options

marqueteur, tourneur, sculpteur

ornemaniste

BEP bois option fabrication bois et matériaux associés :

Le BEP Bois et matériaux associés forme aux secteurs du domaine du bois.

Le titulaire du BEP Bois et matériaux associés peut exécuter des éléments charpentés, de la menuiserie, de la fabrication industrielle de mobilier ou travailler pour la première transformation du bois.

Bac pro artisanat et métiers d’art option ébéniste :

Le titulaire de ce diplôme réalise un prototype destiné à être reproduit en série limitée ou en grand nombre. Le diplômé issu de l'option ébéniste a été formé à la fabrication de mobilier neuf et à la restauration de pièces anciennes. La formation porte sur la connaissance du bois (essences, techniques de traitement, de protection...), des matériels et des techniques de coupe, de montage et de finition, et sur l'organisation de la fabrication. Des cours de gestion et d'histoire de l'art (histoire du mobilier et de l'habitat) ainsi que des enseignements généraux complètent la formation.

BMA ébéniste :

Le titulaire du BMA ébéniste est un technicien d'art intervenant dans la fabrication de meubles ou de mobilier d'agencement : meubles de style, contemporains, marquetés, avec intégration de matériaux innovants, meubles d'art.

BTM ébéniste :

Ce diplôme de la filière artisanale est délivré par quelques chambres de métiers. Il forme des ébénistes capables de concevoir un meuble et des aménagements intérieurs. L'ébéniste maîtrise toutes les étapes de la conception à la fabrication d'un meuble : il établit un cahier des charges ainsi qu'un dessin définitif du meuble permettant au client de visualiser le produit fini. Il prépare la mise en oeuvre de la fabrication en s'assurant de la qualité de chaque étape, il réalise le meuble dans un souci de qualité et assure sa mise en place.

DMA arts de l’habitat option décors et mobilier, spécialité ébénisterie :

Le titulaire de ce DMA est en mesure d'assister le concepteur créateur et de participer à la réalisation ou à la restauration de projets relevant des arts de l'habitat et concernant, selon l'option choisie, les décors et les mobiliers, les ornements et les objets ou la restauration de mobilier.

DMA arts de l’habitat option restauration de mobilier :

L'option restauration de mobilier forme des professionnels capables de poser un diagnostic sur un objet et de proposer une démarche de restauration.

Marquetterie. Photo Carole Obadia.

Marquetterie. Photo Carole Obadia.

ÉTABLISSEMENTS

ET CENTRES DE FORMATION

 

Une centaine d’établissements en France prépare au CAP d’ébéniste.

 

S’informer :

 

• Union nationale de l’artisanat

des métiers de l’ameublement

www.unama.org

 

• Institut national

des métiers d’art (INMA)

www.metiersdart-artisanat.com

 

• Les Compagnons du devoir

www.compagnons-du-devoir.com

 

• Fédération nationale

compagnonnique des métiers

du bâtiment

www.compagnons.org

 

• Chambres de métiers

et de l’artisanat

0 825 36 36 36 (0,15 € TTC la minute)

 

Onisep

www.onisep.fr

Rédigé par Jacques MARIE

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